La semaine du droit du travail

Social - Contrôle et contentieux
30/11/2020
Présentation des dispositifs des arrêts publiés de la Chambre sociale de la Cour de cassation en droit du travail, la semaine du 30 novembre 2020. Sept arrêts cette semaine, dont quatre publiés sur le site internet de la Cour de cassation jeudi dernier. Parmi eux, deux arrêts retiendront plus particulièrement l’attention : le premier donne l’occasion à la Chambre sociale de faire évoluer sa jurisprudence relative à l’illicéité d’une preuve obtenue au moyen de données qui auraient dû faire l’objet d’une déclaration auprès de la Cnil, le second lui permet de revisiter la notion de coemploi.
 
Coemploi : Arrêt n° 1120 du 25 novembre 2020 (18-13.769) - Cour de cassation - Chambre sociale
Il y a lieu de juger, en application de l’article L. 1221-1 du Code du travail précité, que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d’autonomie d’action de cette dernière.
 
Données à caractère personnel dont le traitement doit faire l’objet d’une déclaration préalable à la Cnil : Arrêt n° 1119 du 25 novembre 2020 (17-19.523) - Cour de cassation - Chambre sociale
Il y a donc lieu de juger désormais que l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.

Autorisation de licenciement, cessation d’activité et faute de l’employeur : Arrêt n° 1122 du 25 novembre 2020 (18-13.771 ; 18-13.772) - Cour de cassation - Chambre sociale
La décision d’autorisation de licenciement prise par l’inspecteur du travail, à qui il n’appartient pas de rechercher si la cessation d’activité est due à la faute de l’employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s’il s’y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l’employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l’employeur à l’origine de la cessation d’activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi.

Élections professionnelles : Arrêt n° 1153 du 25 novembre 2020 (19-60.222) - Cour de cassation - Chambre sociale
Aux termes de l’article L. 2314-30 du Code du travail, pour chaque collège électoral, les listes présentées aux élections professionnelles qui comportent plusieurs candidats sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale.
Les dispositions de l’article L. 2314-30, éclairées par les travaux parlementaires, s’appliquent aux organisations syndicales qui doivent, au premier tour pour lequel elles bénéficient du monopole de présentation des listes de candidats et, par suite, au second tour, constituer des listes qui respectent la représentation équilibrée des femmes et des hommes. Elles ne s’appliquent pas aux candidatures libres présentées au second tour des élections professionnelles.

Mise en demeure d'avoir à installer une salle d'allaitement : Arrêt n° 1154 du 25 novembre 2020 (19-19.996) - Cour de cassation - Chambre sociale
Aux termes de l'article L. 1225-32 du Code du travail, tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d'installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l'allaitement.
Cette mise en demeure émane des agents de contrôle de l'inspection du travail dans les conditions prévues par l'article R. 4721-5 du Code du travail.
La cour d'appel relève que la mise en demeure d'avoir à installer une salle d'allaitement émanait d'une organisation syndicale, que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a été saisie de la question de l'absence de salles d'allaitement au sein de l'entreprise, et qu'il n’a pas été n'a pas donné suite à cette demande.

L'employeur n'a donc pas été mis en demeure, au sens de l'article L. 1225-32 visé ci-dessus, d'installer des locaux dédiés à l'allaitement.

Comité d’entreprise, délégation de la présidence par l’employeur : Arrêt n° 1152 du 25 novembre 2020 (19-18.681) - Cour de cassation - Chambre sociale
En application de l'article L. 2325-1, alinéa 2, du Code du travail, alors applicable, le comité d'entreprise est présidé par l'employeur, assisté éventuellement de deux collaborateurs qui ont voix consultative.
L'employeur peut déléguer cette attribution qui lui incombe légalement, à la condition que la personne assurant la présidence par délégation de l'employeur ait la qualité et le pouvoir nécessaires à l'information et à la consultation de l'institution représentative du personnel, de nature à permettre l'exercice effectif des prérogatives de celle-ci, peu important que le délégataire soit mis à disposition de l'employeur par une autre entreprise.

Convention collective Syntec, congé maternité et rémunération variable : Arrêt n° 1115 du 25 novembre 2020 (19-12.665) - Cour de cassation - Chambre sociale
Vu l'article 44 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils et l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n 2016-131 du 10 février 2016
Selon le premier de ces textes, les salariées ayant plus d'un an d'ancienneté dans l'entreprise à la date de leur arrêt de travail pour maternité conservent le maintien intégral de leurs appointements mensuels pendant la durée du congé légal sous déduction des indemnités versées par la sécurité sociale et les régimes de prévoyance.
Il en résulte que ce texte n'exclut pas la prise en compte de la partie variable de la rémunération des salariées lorsqu'elles en perçoivent une.
Pour débouter la salariée de sa demande au titre de la prime de l'année 2013, l'arrêt retient que le maintien de la rémunération étant limité aux seuls appointements mensuels, la salariée ne peut prétendre au maintien de sa rémunération variable pendant son congé maternité.
En statuant ainsi, en se fondant sur la seule partie fixe de la rémunération de la salariée, alors qu'elle avait constaté qu'il lui était également attribué une partie variable liée à l'atteinte d'objectifs annuels fixés dans le cadre d'un plan de performance individuelle et collectif, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
 
 
 
Source : Actualités du droit