Insuffisance d'actif : possibilité pour le juge-commissaire de désigner à tout moment un technicien

Affaires - Commercial
15/09/2016
L'exercice par le liquidateur d'une action en responsabilité civile pour insuffisance d'actif ne prive pas le juge-commissaire de son pouvoir de désigner à tout moment un technicien en vue d'une mission qu'il détermine. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 13 septembre 2016.
En l'espèce, une société (la débitrice) a été mise en redressement judiciaire le 3 mai 2011, lequel a ensuite été converti en liquidation judiciaire. Le 10 août 2011, le liquidateur a assigné son dirigeant, en responsabilité pour insuffisance d'actif et, le 17 décembre 2012, a demandé au juge-commissaire la désignation d'un expert-comptable.

Par ordonnance du 9 janvier 2013, le juge-commissaire a fait droit à la requête et désigné un cabinet d'expertise avec pour mission de déterminer la date de cessation des paiements et examiner les conditions dans lesquelles s'était déroulée l'exploitation. Le liquidateur a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt d'appel qui, d'une part, a déclaré recevable le recours formé par le dirigeant contre l'ordonnance désignant le technicien puis contre le jugement statuant sur cette décision et, d'autre part, a rejeté la demande de désignation d'un technicien.

Sur la question de la recevabilité, la Cour de cassation approuve les juges d'appel : après avoir relevé que les droits et obligations du dirigeant étaient affectés au sens de l'article R. 621-21 du Code de commerce, la cour d'appel en a exactement déduit que l'ancien dirigeant de la société était recevable à exercer un recours contre l'ordonnance désignant le technicien.

Mais elle censure l'arrêt d'appel sur le second point. En effet, pour rejeter la demande de désignation d'un technicien, l'arrêt d'appel a retenu que, si le juge-commissaire peut en application de l'article L. 621-9, alinéa 2, du Code de commerce nommer un technicien en vue de rechercher des faits susceptibles de révéler des fautes de gestion, ce pouvoir cesse lorsque l'action a été engagée devant le tribunal, le rapport du technicien n'étant plus destiné à l'information du mandataire et tendant à "sauver" une procédure manifestement vouée à l'échec en obtenant à bon compte les éléments de preuve qui font défaut. Il en déduit alors qu'une telle pratique n'est pas loyale et détourne les dispositions du texte précité de leur objectif d'information. Énonçant la solution précitée, la chambre commerciale casse l'arrêt d'appel au visa de l'article L. 621-9, alinéa 2, du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008.
Source : Actualités du droit