Champ d’application du droit de préemption de la Safer

Civil - Immobilier
01/04/2019
La Safer ne peut préempter l’ensemble des biens dès lors que son droit de préemption ne peut s’exercer sur l’un d’entre eux.
Un propriétaire de plusieurs parcelles, souhaitait vendre une propriété comportant des terres, prés, landes, bois, ainsi qu’une maison à rénover et un terrain constructible ; le notaire chargé de la rédaction de l’acte a procédé à la notification de la déclaration d’intention d’aliéner à la Safer, qui a exercé son droit de préemption. Le vendeur a sollicité l’annulation de cette décision.

Les juges du fond ont rejeté la demande. Ils ont relevé que toutes les parcelles préemptées n’étaient pas contiguës et se répartissaient en trois zones géographiques différentes, séparées par des parcelles appartenant à d'autres propriétaires. Il s’agissait néanmoins de la vente en bloc d'une exploitation agricole laissant présumer l'unité physique et économique des différents éléments vendus. En outre, et surtout, la partie agricole de la propriété étant prépondérante sur la partie constituée d'un bâtiment d'habitation vétuste et inoccupé, la Safer pouvait exercer son droit de préemption sur l'ensemble des huit parcelles vendues (alors que les juges avaient reconnu que le bâtiment d'habitation ne constituait pas le logement d'un exploitant agricole ni de son personnel et qu’il n'était pas non plus utilisé pour une activité agricole au jour de la cession).

Ils motivent leur décision en s’appuyant sur les termes de l'article L. 143-1 du Code rural et de la pêche maritime, applicable en mars 2014, qui définit le champ d'application matériel du droit de préemption de la Safer quant aux biens et aux opérations concernées : « Il est institué au profit des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural un droit de préemption en cas d'aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à usage agricole et de biens immobiliers qui leur sont attachés ou de terrains nus à vocation agricole (...). Ce droit de préemption peut également être exercé en cas d'aliénation à titre onéreux de bâtiments d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole (…) ».

Le demandeur au pourvoi fait au contraire valoir que le droit de préemption de la Safer ne peut être exercé en cas d'aliénation à titre onéreux de bâtiments d'habitation ne faisant pas partie d'une exploitation agricole et qu’en présence d'une vente globale de biens immobiliers, comportant un bâtiment d'habitation échappant à son droit de préemption, la Safer n'est pas admise à se porter acquéreur de l'ensemble immobilier vendu.

La Cour de cassation censure les juges du fond au visa de l’article L. 143-1 précité du Code rural et de la pêche maritime : « Qu’en statuant ainsi, alors que la Safer ne peut préempter l’ensemble des biens dès lors que son droit de préemption ne peut s’exercer sur l’un d’entre eux, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
Source : Actualités du droit