Loi Sapin II et « simple négligence » du dirigeant : application aux procédures et instances en cours

Affaires - Commercial
07/09/2018
Dans un arrêt rendu le 5 septembre 2018, la Cour de cassation affirme que la « simple négligence » du dirigeant, exclusive, depuis la loi « Sapin II », de la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d’actif, est applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours.
En l’absence de disposition contraire prévue par elle, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, qui écarte, en cas de simple négligence dans la gestion de la société, la responsabilité du dirigeant au titre de l’insuffisance d’actif, est applicable immédiatement aux procédures collectives en cours et aux instances en responsabilité en cours (cf. C. com., art. L. 651-2, version de l'article en vigueur). Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation.

Dans cette affaire, une société a été mise en liquidation judiciaire le 2 décembre 2011. Le liquidateur a assigné le dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’actif de cette société. Cette demande ayant été rejetée (CA Chambéry, 17 janv. 2017, n° 16/00375), il a formé un pourvoi en cassation. Il soutenait qu’aux termes de l’article L. 651-2 du Code de commerce (dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 146 de la loi précitée, applicable en l’espèce), une négligence pouvait constituer une faute de gestion. Selon lui, la cour d'appel avait méconnu ce texte en affirmant que la responsabilité du dirigeant ne pouvait être engagée en cas de négligence dans la gestion de sa société, de sorte que le dirigeant ne pouvait, en l’espèce, se voir reprocher une faute dans la gestion de la société débitrice.

La Cour de cassation rappelle que selon les articles 1er et 2 du Code civil, la loi nouvelle s’applique immédiatement aux situations et rapports juridiques établis ou formés avant sa promulgation, à moins que cette application immédiate ne méconnaisse un droit acquis. Par ailleurs, elle précise que le caractère facultatif de la condamnation du dirigeant à supporter, en tout ou partie, l’insuffisance d’actif de la société, exclut tout droit acquis du liquidateur à la réparation du préjudice auquel le dirigeant a contribué par sa faute de gestion. Il en résulte, dès lors, la solution précitée. Par suite, la cour rejette le pourvoi.

Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit