Aides d'Etat : la France doit récupérer plus de 642 millions d'euros octroyés à la Sernam

Affaires - Droit économique
08/03/2018
La France doit récupérer un montant de plus de 642 millions d'euros (hors intérêts) dans le cadre d'une aide d'Etat accordée à la société Sernam. Telle est la solution énoncée par la CJUE dans un arrêt du 7 mars 2018.

Dans cette affaire, à la suite d'une décision de la Commission (décision "Sernam 2"), la France a indiqué à la Commission la vente des actifs en bloc de Sernam (filiale à 100 % de la SNCF), l'acquéreur étant la Financière Sernam, une société créée par l'ancienne équipe de direction de Sernam.

Saisie de plusieurs plaintes, la Commission a constaté par la suite que la condition relative à la vente des actifs en bloc de Sernam n'avait pas été respectée et qu'une aide qui avait été déclarée incompatible de 41 millions d'euros n'avait pas été récupérée. Elle en a conclu qu'une première aide à la restructuration de 503 millions d'euros, autorisée sous conditions en 2004 (de retrait du marché ou de vente des actifs en blocs), avait été mise en oeuvre de manière abusive et était incompatible avec le marché intérieur. La Commission a également déclaré que les mesures octroyées par la SNCF aux fins de réaliser la "vente des actifs en bloc", à savoir la recapitalisation de Sernam par la SNCF à hauteur de 57 millions d'euros nets, l'abandon de 38,5 millions d'euros de créances envers Sernam par la SNCF ainsi que certaines des garanties octroyées par la SNCF lors de la transmission des activités de Sernam à la Financière Sernam constituaient de nouvelles aides d'Etat incompatibles avec le marché intérieur. Cette décision a été confirmée par le Tribunal de l'Union européenne et, à sa suite, par la CJUE.

En particulier, la Cour confirme que la décision "Sernam 2" avait pour but de supprimer la présence de Sernam sur le marché surcapacitaire afin de prévenir toute distorsion de concurrence liée à l'octroi de l'aide à la restructuration de 503 millions d'euros.

Il s'ensuit que le Tribunal a correctement conclu que la finalité de la vente des actifs en bloc de Sernam visait l'interruption de l'activité économique de Sernam et la disparition de celle-ci. La Cour confirme également que la condition relative à la vente des actifs en bloc de Sernam doit s'entendre comme excluant les passifs, si bien que le Tribunal a conclu à bon droit que cette condition n'a pas été respectée, la vente réalisée ayant également porté sur la quasi-totalité des passifs de Sernam.

De même, le Tribunal et la Commission ont correctement conclu à la continuité économique entre Sernam et la Financière Sernam par l'intermédiaire de Sernam Xpress. En effet, cette dernière était la débitrice de l'obligation de récupération de l'aide illégale. Enfin, la Cour confirme que le test de l'investisseur privé n'est pas applicable à la mise en oeuvre d'une mesure compensatoire.

 

Par Vincent Téchené

Source : Actualités du droit